L'Association Les Comédiens à Schœlcher en Martinique est fière d'offrir des cours de théâtre pour enfants, adolescents et adultes, animés par Julie Mauduech.
Julie Mauduech, Professeur de théâtre
Julie Mauduech, de Métisse à l’association des Comédiens
Depuis dix ans, la comédienne transmet sa passion des planches dans sa Martinique natale, et défend un théâtre inclusif et libérateur, dans une époque qui a refermé le jeu. – Texte Clara Tran, Photos Pierre de Champs
Elle parle vite et se raconte bien, de sa voix enjouée et légèrement fêlée : « J’étais en cours tout l’après-midi hier », souffle Julie Mauduech. Voilà vingt ans que l’actrice, révélée par le film Métisse (Mathieu Kassovitz), est revenue dans sa Martinique natale pour y transmettre sa passion des planches.
Sur scène, tous servent Racine, Anouilh etc.
Avec son association baptisée Les Comédiens, cette ancienne costumière a formé pléthore d’élèves : des enfants, adultes, ados, petits en situation de handicap, « noirs, blancs, riches, pauvres ».
Le répertoire est solide mais pas bégueule : « Je ne me prends pas trop la tête », indique-t-elle, avec la décontraction de celles qui ont l’égo tranquille. « On a de beaux textes alors autant les faire vivre ». Son théâtre est joyeux, décomplexé, inclusif.
« J’aime l’idée qu’on soit tous égaux sur scène. Je traite tout le monde de la même façon. Et je crois que lorsque l’on a ce regard, les élèves qui sont considérés comme différents ou ceux qui arrivent un peu timides, peuvent changer, prendre confiance ».
Son cours à Schœlcher est désormais le premier de l’île.
Elle doit cette victoire à son enthousiasme fédérateur et sa passion continuée.
Née à Marseille, Julie Mauduech est arrivée en Martinique à l’âge de quatre ans. « On avait fait la traversée sur un bananier », se remémore-t-elle.
Enfance pleine d’alacrité et de surf : un père directeur d’usine, une mère, coiffeuse dans un grand salon de l’île.
Confrontée à la maladie à 16 ans, Julie se rend à Paris pour se faire soigner. Elle s’installe chez sa tante dans le 19e, au 5 rue Courat, avec comme voisins Kim Chapiron, Costa Gavras, Mathieu Kassovitz, le futur père de l’une de ses filles.
Souvenir toujours aussi ébloui, tant de temps après : « Il y avait un tel élan créatif, tout le monde était artiste dans l’immeuble. Moi j’étais restée la petite martiniquaise, c’est vraiment là où j’ai découvert le cinéma ».
Attention, bienveillance exigeante, honnêteté
Julie Mauduech n’était pas encore l’affolante métisse du long métrage de Mathieu Kassovitz. « J’étais très timide », se souvient-elle, « un peu en retrait quand je sortais faire la fête. Moi je kiffais le zouk, je ne dansais pas le hip hop de ces années-là ».
Nul désir de cinéma, mais un goût tout de même pour le jeu, une curiosité ouverte pour la scène.
« J’étais complexée, j’avais l’impression de ne pas avoir de culture, je détestais les examens alors je me suis dit : tu vas faire du théâtre, ça va te faire du bien ».
Après le bac, elle plaque la fac et s’inscrit au Cours Florent. Période incandescente : « Je me souviens d’une atmosphère d’exaltation, où on se voyait chez les uns et les autres pour répéter », raconte-t-elle.
Elle salue ses professeurs qui lui ont permis de sortir de sa timidité et de trouver confiance. « Ma coach préférée s’appelait Elisabeth Rodriguez », se souvient-elle. « C’est celle que tout le monde détestait. Elle était très exigeante, mais moi, j’aimais quand elle nous cassait sur scène parce que quand elle te disait que c’était bien, ça voulait dire que c’était vraiment bien ».
Elle fait plutôt dans l’attention, la constance, la bienveillance exigeante. « L’honnêteté » ajoute-t-elle.
« Je déteste la complaisance, le manque de respect. Je suis à l'écoute de mes élèves. Parfois, ils me proposent des choses dans la mise en scène. Si c’est pertinent, j’intègre. Il ne faut pas avoir d’égo quand on fait ce métier ».